Un Lièvre en son gîte songeait
(Car que faire en son gite à moins que l’on ne songe)
Dans un profond ennui ce Lièvre se plongeait :
Cet animal est triste, et la crainte le ronge.
Les gens de naturel peureux
Sont, disait-il, bien malheureux :
Ils ne sauraient manger morceau qui leur profite.
Jamais un plaisir pur ; toujours assauts divers :
Voilà comme je vis : cette crainte maudite
M'empêche de dormir, sinon les yeux ouverts.
Corrigez-vous, dira quelque sage cervelle.
Et la peur se corrige-t-elle ?
Je crois même qu'en bonne foi
Les hommes ont peur comme moi.
Ainsi raisonnait notre Lièvre,
Et cependant faisait le guet.
Il était douteux, inquiet ;
Un souffle, une ombre, un rien, tout lui donnait la fièvre.
Le mélancolique Animal,
En rêvant à cette matière,
Entend un léger bruit : ce lui fut un signal
Pour s'enfuir devers sa tanière.
Il s'en alla passer sur le bord d'un Étang :
Grenouilles aussitôt de sauter dans les ondes;
Grenouilles de rentrer en leurs grottes profondes.
Oh ! dit-il, j'en fais faire autant
Qu'on m'en fait faire ! ma présence
Effraie aussi les gens ! je mets l'alarme au camp !
Et d'où me vient cette vaillance?
Comment ! des Animaux qui tremblent devant moi !
Je suis donc un foudre de guerre?
Il n'est, je le vois bien, si poltron sur la terre,
Qui ne puisse trouver un plus poltron que soi.
Ce texte convient aux âges/niveaux suivants:
Nombre de mots | |
Mots très fréquents | |
Mots moins fréquents | |
Pourcentage |
Wikipédia
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_de_La_Fontaine
Enregistrement
https://www.youtube.com/watch?v=cy149bI2kAo